Les fouilles programmées sur l'oppidum de Bramefan (commune de Puyloubier, Bouches - du - Rhône) en cours depuis 1992 s'intègrent au projet collectif de recherche sur l'occupation des sols et l'évolution des paysages dans le Massif de la Sainte - Victoire. L'oppidum est situé sur le versant sud de la montagne dans la partie est du massif, à environ deux kilomètres au nord - ouest de Puyloubier. L'habitat s'étend de la mi - pente jusqu'au pied de la falaise et domine la plaine de l'Arc (fig. 1).
Les premiers sondages ouverts sur la terrasse inférieure ont été élargis pour arriver à un transec nord - sud de celle-ci.
L'objectif principal de la campagne 1994 était d'effectuer des décapages jusqu'au substratum, de verifier les résultats antérieurement aquis, de préciser la datation, d'identifier les structures d'habitats mises en jour et de rechercher des niveaux en place d' une occupation ancienne (Ve siècle av. J.-C.).
En 1992 et 1993 deux stèles anépigraphes de grès dont l'une porte des décors ont été découvertes dans la zone supérieure de l'oppidum (sondages 1, 3 et 5). Ces blocs réutilisés pendant la dernière période d'occupation (Bramefan II) indiquent probablement l'existence d'un sanctuaire (début de Deuxième Age de Fer, Ve siècle av. J.-C.) antérieur à cette dernière phase. Le niveau de circulation a également donné des vestiges de foyers et de vidanges. Ils semblent constituer une zone d'activités artisanales (petite métallurgie). L'enceinte (observée l'année dernière) respose soit directement sur le substrat calcaire, soit sur un remblai d'argile et de moellons, soit encore sur un soubassement argileux contenant des tessons de
dolia
et de céramique campanienne. Ces trouvailles et la rélation des niveaux entre le remblai et le niveau de circulation laissent supposer que le site a été occupé un certain temps avant d'être fortifié.
Sur la terrasse inférieure deux murs parallèles ont été dégagés dans les sondages 2, 4 et 8. Ils constituent un bâtiment assez grand, orienté probablement est - ouest et correspondant à la terrasse. Ses dimensions exactes et son plan détaillé restent encore inconnus. Le niveau d'occupation correspondant à ces murs est matérialisé par un
dolium
brisé en place, les traces d'un foyer et un aménagement circulaire de pierres. Dans la couche de destruction et dans l'éboulement ont été repérés des fragments de tuiles (
tegulae
et
imbrices
), de la céramique campanienne A tardive, des amphores italiques (Dr. IA) et une fibule de type dit "Nauheim". Ces données permettent de dater cette dernière phase entre le premier siècle et l'époque augustéenne (Bramefan IIb).
Une phase antérieure (Bramefan IIa) est représentée par un niveau de fonctionnement qui comporte une plaque de foyer, des pavements de
dolia
et de galets et un sédiment sableux fin, surmontés par l'un de deux murs. À côté d' un des pavements de
dolia
deux plats de campanienne A moyenne (Lamb. 5/7) complets ont été trouvés en place (fig. 2). Il s'agit probablement d'une zone de préparation de nourriture, de consommation et de stockage à l'intérieure d'une cabane dont le plan et les dimensions nous échappent totalement.
L'ensemble de cette occupation (Bramefan II) est installé sur un dépôt colluvial assez épais qui a livré beaucoup de matériel. On recense plusieurs kilos de céramique indigène avec principalement des urnes, des jattes et des coupes. Quelques éléments caractéristiques (bords biseautés, décor incisé très finement, coupes carénées, grands urnes...) permettent de dater l'ensemble de la fin du Premier et du début du Deuxième Age du Fer (Bramefan I). Une fibule filiforme celtique de type dit "Marzabotto", deux oboles massaliètes de type ancien, un
scalptorium
en bronze, un disque en bronze à rebord (pied d'une fibule ?) ainsi que des amphores étrusques et de Marseille, de la céramique attique à figures noires (cratère ?) et pseudo - ionienne de Marseille (coupe, oenochoe), de la céramique grise- monochrome (oenochoe, cruche, coupe etc.) confirment cette datation et permettent de préciser la durée d'occupation entre 525 et 375 av. J. C. Ces couches contiennent beaucoup de macrorestes végétaux et d'ossements dont l'étude est en cours.
Malheureusement aucune structure d'habitat de cette phase (Bramefan I) n'a été reconnue. Le substratum crétacé n'a pas encore été partout atteint et il est donc possible que de telles structures puissent être mises au jour.
Le matériel métallique et céramique ainsi que les stèles anépigraphes suggèrent l'existence d'un important habitat préromain du début du Deuxième Age de Fer, le plus ancien du versant sud du Massif de la Sainte - Victoire. Cet habitat perché paraît lié à plusieurs sites découverts sur la commune de Puyloubier à l'occasion des prospections récentes aussi bien dans la plaine (La Tour, Richeaume, La petite Rouvière) que sur le flanc de la montagne (le Mitronet).
Ces travaux permettent de mieux documenter l'habitat préromain le plus ancien du Massif de la Sainte - Victoire tant au niveau de l'architecture que des aménagements domestiques, de son économie et de son evironnement.
Dans l'état actuel de l'avancement des travaux de terrain il apparaît qu'une ultime campagne de fouilles programmées est nécessaire afin : d'achever les sondages déjà ouverts sur la terrasse inférieure (sondages 2, 4 et 8), d'achever le relévé stratigraphique des coupes, d'affiner la datation de l'occupation la plus ancienne et de caractériser sa nature.
Les resultats obtenus sur l'oppidum de Bramefan sont d'une part évidemment intégrés au programme "occupation du sol et évolution des paysages dans le Massif de Sainte - Victoire" et d'autre part feront l'objet d'une étude monographique qui sera notamment illustrée par le plan topographique de l'ensemble du site, actuellement en cours de réalisation par le Service Régional de l'Archéologie.